1-Les parties du discours

1-Les parties du discours :

 

1-1-L’adjectif.

La catégorie de l'adjectif en français n'est guère identifiable morphologiquement, même si certains adjectifs(variables) continuent à s'accorder en genre et en nombre avec le nom qu'ils déterminent (définition classique). Les adjectifs sont de formes très diverses (bon/bonne ; rouge, vert/verte ; agréable, incompréhensible,...), ne s'accordent pas toujours (cf. une robe marron, une robe vert bouteille) ; des substantifs servent fréquemment d'"adjectifs" (peuvent avoir une fonction d'épithète lorsqu'ils sont postposés au nom-noyau du SN) "un papier cadeau" ; "une femme bien ".

Sauf quand ils sont attributs, les adjectifs sont toujours des éléments facultatifs de la phrase, c'est-à-dire que ce qu'ils signifient peut être laissé implicite (relève de la situation) ; la présence de nombreux adjectifs, ou locutions adjectivales diverses, est de ce fait extrêmement révélatrice et le choix, la place, l'abondance des adjectifs peut être un élément très significatif pour la description d'un texte littéraire.

        Dans une phrase comme "Cet homme blond qui m'a parlé devant la porte m'a retenue alors que je devais prendre le bus pour Monaco" : "blond", "qui m'a parlé devant la porte" ne sont pas indispensables grammaticalement à l'existence d'une phrase, même s'ils ont une fonction sémantique non négligeable : comparer avec la phrase "Cet homme m'a retenue" (de même que "alors que je devais prendre le bus pour Monaco", complément de phrase, non essentiel, comme on dit quelquefois).

La place de l'adjectif                

  Certains adjectifs ne peuvent apparaître qu'après le nom. Mais beaucoup d'autres apparaissent selon le cas avant ou après le nom. Les facteurs qui interviennent pour régler la place de l'épithète sont de natures diverses. On traitera successivement ci-dessous de facteurs formels, puis de facteurs sémantiques.

Au plan formel, on a souvent évoqué la question de la taille de l'adjectif : les adjectifs brefs (notamment monosyllabiques) étant considérés comme antéposables, alors que les adjectifs longs (polysyllabiques) ne le seraient pas. En fait ce critère est le plus contestable. Si l'on trouve des adjectifs brefs antéposés ("une longue route", "un grand bateau", "de noirs desseins"…) on trouve également devant le nom des adjectifs longs ("une agréable promenade", "une ravissante idiote", "une exceptionnelle aventure"…), et l'on trouve également des adjectifs brefs postposés ("une robe rouge", "un homme vieux", "un adjectif bref"…), aussi bien que des longs ("une promenade agréable", "un enfant insupportable", "une histoire extraordinaire"…). Dans un cas comme dans l'autre, on peut se demander si les contre-exemples ne sont pas aussi nombreux que les exemples !

Toujours au plan formel mais plus significatifs sont les éléments tenant à la structure du syntagme nominal ou à la structure du syntagme adjectival lui-même. Arrivé, Gadet, Galmiche, 1986, rappellent les facteurs suivants :

  • la présence dans le SN d'un complément prépositionnel facilite l'antéposition : "un travail facile" (l'antéposition est peu vraisemblable) mais "un facile travail de documentation" (l'antéposition est rendue possible) ;
  • quand l'épithète constitue elle-même un syntagme, avec un (ou des) complément(s), elle est normalement postposée : "une grammaire remarquablement bonne" (avec toutefois : "une très bonne grammaire"), "un bon spectacle" (l'antéposition est seule possible) mais "un spectacle bon pour les enfants".

Mais les facteurs sémantiques jouent également un rôle très importants.

"Ses noirs idées terrifiaient son entourage." (=son pessimisme).

                 "L'épithète antéposée qualifie le contenu notionnel (le signifié du nom). L'épithète postposée qualifie le référent visé, dans les circonstances ponctuelles de l'énonciation, par le syntagme nominal."

C'est en raison de l'explication sémantique précédemment avancée (un sème semblable dans le nom et l'adjectif) que l'adjectif antéposé qui qualifie le contenu notionnel joue le rôle d'"intensificateur sémique" ; c'est aussi pourquoi, concrètement, les adjectifs "de dimension" peuvent être souvent antéposés (avec d'ailleurs dans ce cas un sens différent du sens qu'ils prennent quand ils sont postposés) :

  "un grand homme"-  "une large avenue" - ou "un large consensus" ! -  "un gros commerçant".

Ici, les mots "homme", "avenue", "commerçant" ainsi que la plupart des mots concrets français, contiennent un sème référant à la notion de dimension qui se trouve ainsi "intensifiée" par le sème "dimension" de l'adjectif. De ce fait "un grand homme" n'est pas un homme "grand" mais quelqu'un qui est "grandement homme", "un gros commerçant" n'est pas un commerçant gros, mais quelqu'un qui est "grossement commerçant", c'est-à-dire qui a un gros commerce, et "l'agréable promenade" est une promenade qui est "agréablement promenade".

L'adjectif antéposé manifeste ainsi l'une des qualités intrinsèques du nom, et il ne représente pas une propriété extérieure au contenu notionnel, comme lorsqu'il est postposé. Il n'y a pas des adjectifs antéposés "en soi", mais des adjectifs qui s'antéposent plus naturellement devant certains noms ; en outre certains adjectifs peuvent être plus aisément antéposés que d'autres, car ils ont la propriété d'avoir un usage plus large, d'être utilisables avec de nombreux noms pour lesquels ils deviennent intensificateurs sémiques.                                                                 Comme le disent Arrivé, Gadet, Galmiche, ces observations permettent de rendre compte de plusieurs phénomènes :

  • les adjectifs qui désignent des qualités distinctives, dont l'énonciation permet des classifications, sont généralement postposés. C'est le cas des adjectifs de couleurs, de formes, ainsi que des adjectifs relationnels [voir ci-dessous]. Quand, par exception, un adjectif de couleur perd cette fonction classificatrice (par exemple quand la couleur est une qualité inséparable, ou jugée telle, du signifié du nom, l'antéposition redevient possible : Ex. : "les vertes prairies" ;
  • inversement les adjectifs qui désignent des qualités considérées comme affectant de façon permanente le contenu notionnel du nom ont tendance à s'antéposer. On constate alors que l'opposition entre l'anté- et la postposition n'est pas un trait qui affecte l'adjectif seul, mais l'ensemble qu'il constitue avec le nom. Il est donc inutile de dresser des listes d'adjectifs, qu'il serait facile de confirmer avec certains noms et de falsifier avec d'autres ;
  • quand on observe une différence de sens caractérisée entre l'adjectif selon qu'il est antéposé ou postposé à un même nom, cette différence se laisse le plus souvent analyser selon la règle énoncée plus haut. On cite souvent sous cette rubrique une liste très restrictive d'adjectifs : grand (grand homme / homme grand), simple (une simple lettre / une lettre simple), ancien (un ancien professeur / un professeur ancien " qui a de l'ancienneté"), vague (une vague idée / une idée vague), vrai (une vraie aventure / une aventure vraie), apparent (une apparente folie / une folie apparente) et quelques autres. En réalité, ce fonctionnement atteint, de façon plus ou moins claire selon le sens de l'épithète et du nom, un grand nombre d'adjectifs : une belle femme est une femme en qui la féminité est belle ; une femme belle es belle sans référence spécifique à son statut de femme. Cependant, le fonctionnement est parfois masqué par le fait que certaines postpositions sont peu grammaticales, pour des raisons de sens plus ou moins évidentes. Ainsi, on parlera volontiers d'un "gros industriel" ou d'une "petite hystérique" (une personne chez qui l'hystérie est légère), mais on aura plus rarement l'occasion d'alléguer "un industriel gros" (obèse) ou "une hystérique petite" (de petite taille). Cependant, la construction attributive est possible ("cet industriel est gros"),avec le sens qu'aurait l'adjectif postposé;
  • on observe dans certains cas une neutralisation de l'opposition de sens entre l'épithète antéposée et postposée. Ainsi il est difficile de distinguer entre "une luxueuse réception" et "une réception luxueuse". Cette suspension de l'opposition s'explique par le fait que les deux mécanismes qualificatifs produisent le même effet de sens.

Il reste que certains adjectifs, qui ne peuvent jamais être intensificateurs sémiques (devant aucun nom) ne peuvent jamais être antéposés. On citera :

  • les participes passés : un enfant énervé (… qui est énervé ou qu'on a énervé)
  • les participes présents : un paquet encombrant (qui est encombrant)
  • les adjectifs relationnels : un bâtiment municipal (de la municipalité).

Dans les deux premiers cas, la valeur verbale reste présente comme le montrent les périphrases avec relatives proposées ("qui est") ; pour les adjectifs relationnels, leurs propriétés particulières, qui les distinguent assez largement des qualificatifs, suffisent à expliquer leur fonctionnement syntaxique particulier.

"a) certains adjectifs indiquent une qualité, ou propriété essentielle ou accidentelle, de l'objet désigné par le nom (ou le pronom) : "une robe rouge", "un livre intéressant", "celui-ci est mauvais". b) d'autres adjectifs établissent une relation entre le nom et un autre élément nominal : dans "le discours présidentiel", l'adjectif est l'équivalent d'un complément de la forme : "du président" ; il indique une relation entre le nom "discours" et le référent désigné par le nom "président". de même, dans "le voyage alsacien du Ministre", l'adjectif "alsacien" […] est l'équivalent de "en Alsace".
Du point de vue syntaxique, on observe entre les adjectifs de ces deux sous-classes les différences suivantes :

·        sauf phénomène de blocage sémantique, les adjectifs de la première classe (qualificatifs au sens strict) sont aptes à marquer les degrés de la qualité signifiée : "un livre très (assez, plus, moins, etc.) intéressant". Cette possibilité est évidemment interdite aux adjectifs de la seconde classe (parfois dits relationnels) : "le voyage du président" ne peut pas être dit "très (assez, plus, moins, etc.) présidentiel" ;

·        les qualificatifs peuvent fonctionner comme attributs ("cette robe est rouge", "ce livre paraît intéressant"). Les relationnels ne le peuvent généralement pas : "ce voyage est présidentiel" (voir cependant plus bas) ;

·        le qualificatif épithète peut se voir substituer une relative ("la robe qui est rouge"). L'adjectif relationnel ne le peut pas : "le voyage qui est présidentiel"

L'ensemble de ces traits différentiels amène certains linguistes à donner aux éléments de la 2e classe - les relationnels - le nom de pseudo-adjectifs.

Il conviendrait de citer encore certains "noms" qui servent d'adjectifs, et qui ne peuvent être que postposés, même si la relation nom - adjectif n'est plus une relation passant par le verbe être (relation d'attribut) : on peut gloser cette relation au moyen de divers verbes :
- "un enfant modèle" c'est "un enfant qui sert de modèle"
- "un papier cadeau" c'est "un papier qui enveloppe les cadeaux"
- "une lessive miracle" c'est "une lessive qui fait des miracles"      etc.

Dans tous ces cas (paraphrase par "qui est" ou paraphrase avec d'autres verbes), il y a une relation verbale sous-jacente, et dans tous ces cas l'antéposition est impossible. La paraphrase souligne la différence de ces adjectifs jamais antéposables avec les adjectifs antéposables qui ne peuvent être paraphrasés par "qui est X" : un "grand homme" ce n'est pas un homme qui est grand (on dit que "Napoléon était un grand homme", mais l'on sait qu'il était justement très petit), mais quelqu'un dont l'humanité est grande, qui est grand dans sa façon d'être homme (et non pas grand physiquement).                                                                                 

                De fait - et les explications sémantiques données ci-dessus expliquent cela - peu d'adjectifs, pour un nom donné, sont susceptibles de devenir intensificateurs sémiques et donc d'être antéposés .

           En revanche, après le nom, plusieurs classes d'adjectifs sont possibles. On peut s'interroger sur d'éventuelles contraintes d'ordre :
- On va effectivement des caractéristiques les plus intrinsèques au caractéristiques les plus externes : cf. "un enfant blond, fatigué, qui n'a pas appris ses leçons". Tout changement dans l'ordre des adjectifs/propositions relatives est ici impossible.
- Les "compléments de noms" (compléments indirects introduits par "de") suivent à peu près immédiatement le nom : aussi bien quand ils expriment la possession ("le fils de mon frère") que la provenance "le train de Paris", ou le contenu "une tasse de café", etc.

 

1-2-L’adverbe.

Du point de vue morphologique la catégorie dite des adverbes, catégorie invariable, accueille des mots ou des locutions de formes diverses :

Certains viennent du latin comme "bien", "peu" , "hier"... Ils ont des formes très variées, résultats d'évolutions différenciées. D'autres ont été formés en bas latin ou ancien français : "avant", "assez", "dedans"...

D'autres encore sont empruntés à des langues étrangères comme "crescendo", "franco" qui viennent de l'italien, ou "ad hoc" qui vient du latin, sans modification...

La plupart des adverbes sont des adverbes en "-ment" formés par suffixation sur le féminin de l'adjectif : "heureusement", "fièrement", etc. mais on ne peut pas former des adverbes sur tous les adjectifs !

On signalera aussi une tendance, très fréquente en français contemporain qui consiste à effectuer une "dérivation impropre" à partir de l'adjectif : à côté de "chanter fort" ou "tenir bon" (formes traditionnelles) on trouve maintenant "acheter utile" ou "voyager confortable".

Comme les compléments de noms qui développent de nombreuses locutions adjectivales, on a affaire dans le domaine de l'adverbe à des locutions adverbiales formées sur une base nominale, souvent précédée d'une préposition : "par hasard", "de bonne heure", "le lendemain"...

On préférera un classement syntaxique, qui permette de rendre compte du fonctionnement (varié) des adverbes qui relèvent précisément de ce point de vue de plusieurs catégories, selon le niveau où ils interviennent. Un même adverbe peut figurer à divers niveaux.

Maingueneau distingue ainsi :

Les adverbes intégrés à la phrase :

Les adverbes qui portent sur une catégorie élémentaire :

Ainsi, ils sont contigus à

- un adjectif : "très souple",

- un adverbe : "particulièrement intelligemment", "plus honnêtement",

- une préposition : "juste devant la maison"...

- un verbe : "il court mal", "il dort beaucoup".

Les adverbes circonstanciels

(à valeur locative ou temporelle)

- "Il dort ici" ;   - "Il nous visite souvent"

Les adverbes non intégrés à la phrase :

Les adverbes de point de vue

- "C'est demain qu'il part"

Les adverbes de phrase (ils se placent dans des positions détachées, ne supportent pas une focalisation par c'est ... que, peuvent figurer en tête d'énoncés négatifs)

- "Normalement, il doit venir", / "Normalement il ne vient pas" / *C'est normalement qu'il vient

# "*Lentement, il ne vient pas"

Ce classement qui ouvre la voie à une meilleure compréhension des adverbes et de leur fonctionnement, présente l'inconvénient d'être assez hétérogène : on est gêné par une terminologie qui oppose des "adverbes de point de vue" (notion sémantique) à des "adverbes de phrase" (notion syntaxique). Du point de vue syntaxique on peut insister néanmoins sur la différence essentielle qui sépare :

les adverbes portant sur un adjectif ou un adverbe (la distinction entre adjectif et adverbe n'étant ici d'ailleurs pas très pertinente de fait : quand on a "il chante très fort", "fort" est un adverbe, mais quand on a "un homme très fort", fort est un adjectif ; la distinction est contextuelle (présence dans un SN ou un SV) il s'agit surtout de souligner que les adverbes ; comme "très", "plus", "bien", etc. peuvent servir de "compléments" à d'autres "adjectifs/adverbes", de même d'ailleurs que certains adverbes en -ment : "il chante particulièrement fort" / "il chante joliment bien")

les adverbes portant sur un verbe (parfois, comme nous l'avons vu, ce sont les mêmes mots : cf. "il chante fort/bien) : "il dort ici", "il mange beaucoup"...

enfin les adverbes compléments de phrase : beaucoup d'adverbes déjà cités peuvent être compléments de phrase, ainsi que de nombreuses locutions adverbiales, mais pas tous :

"*fort, il chante chaque samedi" # "chaque samedi, il chante fort"

"*beaucoup, il prend le bateau" # "souvent, il prend le bateau"

Les compléments d'adjectifs ou d'adverbes se placent avant eux ; les adverbes compléments de verbe (ou de phrase), qui sont parfois des locutions formées à partir de noms précédés ou non d'une préposition ("il travaille le samedi" ; "il progresse avec lenteur / lentement"), se placent après le verbe. Plus spécifiquement, les adverbes qui sont compléments de phrase (notons bien que certains adverbes, dans tel contexte compléments de verbe peuvent être compléments de phrase dans un autre contexte), le test de la permutation suffit à les identifier par rapport au compléments de verbe (qui ne peuvent pas permuter). Dans la phrase suivante "avec prudence" est une locution adverbiale complément de phrase :

"Avec prudence, il avança jusqu'à la barrière" / "Il avança jusqu'à la barrière avec prudence".

Nous proposerions donc de définir trois positions syntaxiques pour les adverbes, mais en soulignant que de nombreux "adverbes" ou "locutions adverbiales" peuvent apparaître dans l'une ou l'autre des catégories, et qu'il ne s'agit donc pas d'adverbes s'opposant par leur appartenance à une classe de commutation : tout au plus pourrait-on établir des classes distributionnelles, et classer ainsi les adverbes en fonction de l'ensemble des contextes syntaxiques qu'ils admettent). "bien" n'a pas la même distribution que "beaucoup", mais a probablement la même distribution que "joliment". On peut dire en effet :

"Il chante bien"    "Il chante joliment"     "Un homme joliment habillé"   "Un homme bien habillé"

        On pourra dire encore :

"Il chante bien joliment"

"Il chante joliment bien"

      Si l'on dit :

"Il chante beaucoup"

peut-être et encore : "?un homme beaucoup habillé"

on ne dira sûrement pas : "*il chante joliment beaucoup"

ou "*il chante bien beaucoup"

ou encore : "*il chante beaucoup joliment"

ou "*il chante beaucoup bien"

   C'est ainsi qu'il faudrait procéder pour établir ces classes distributionnelles, dont l'intérêt, cependant, resterait limité : il s'agit surtout pour nous ici de repérer les positions pertinentes dans un texte, et non pas tant de classer définitivement les adverbes [Nous sommes d'ailleurs convaincue de l'inutilité d'un tel classement pour une classe "ouverte" : un auteur peut toujours, pour rendre un effet particulier, décider un jour de changer la distribution courante d'un adverbe en l'introduisant dans une position que l'on n'attend pas : nous avons vu que bien des cas sont syntaxiquement possibles (cf. l'antéposition de l'adjectif) s'il s'agit d'utiliser le lexique de la langue de façon encore plus variée : c'est précisément comme cela que la langue évolue, et toute attitude trop strictement "normative" n'a guère de sens en littérature.]

 

1-3-La conjonction.

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INTRODUCTION

conjonction, nom donné à deux classes de termes, dont la première, regroupant les conjonctions de coordination, sert à relier des éléments de même rang syntaxique, qu'il s'agisse de mots, de groupes de mots, de propositions ou de phrases, et la seconde, regroupant les conjonctions de subordination, permet de relier les propositions dites subordonnées à la proposition principale dont elles dépendent.

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LES CONJONCTIONS DE COORDINATION

Les conjonctions de coordination (et, ou, ni, mais, or, donc, car) ont à la fois des emplois spécifiques et d'autres comparables à ceux de certains adverbes ou locutions adverbiales, comme puis, ensuite, toutefois, néanmoins, cependant, pourtant, ainsi, aussi, par conséquent, en effet, etc.

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Et

Et marque l'addition. Dans une énumération, seuls les deux derniers termes, en général, sont coordonnés par et (Rajoutez de l'huile, du sel, du poivre et des épices). Lorsque et coordonne des propositions, il peut exprimer diverses nuances, en rapport avec le sens de ces propositions, notamment la succession dans le temps (Continuez tout droit et tournez à gauche au bout de l'avenue) ou la conséquence (La nuit tombait et on distinguait mal les contours des objets).

2

 

Ni

Ni sert à coordonner des éléments de rang identique dans une structure négative. Il fonctionne comme un équivalent de et… ne pas. Il est le plus souvent répété devant chacun des termes niés (Elle n'est ni grande ni petite ; ni l'un ni l'autre n'est intervenu).

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Ou

Ou marque, dans la plupart des cas, une alternative (Vous préférez du café ou du thé ? C'est ça ou rien), dont le caractère exclusif peut être souligné par la locution ou bien… ou bien (Ils sont ou bien en retard ou bien déjà partis). Entre les deux derniers termes d'une énumération, la locution ou encore exprime une possibilité complémentaire (Vous pouvez prendre le train, l'avion ou encore votre voiture). Ou peut aussi indiquer une équivalence entre un terme rare et un terme plus courant ou une expression définitionnelle (la géodésie, ou étude de la forme et de la dimension de la Terre). Dans ce cas, le second élément est employé sans déterminant.

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Mais

Mais peut relier des mots (Il est tatillon mais compétent), des propositions ou des phrases. Sa valeur est généralement oppositive, c'est-à-dire qu'il permet d'opposer un élément à un autre en vertu d'un raisonnement implicite. Ainsi, dans Il avait un avis contraire mais il n'a rien dit, la seconde proposition va à l'encontre de ce que la première laissait attendre.

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Or, donc et car

Or, donc et car ne peuvent relier que des propositions.

Or sert à introduire un nouvel élément dans un enchaînement argumentatif (Il a prétendu ne pas avoir été mis au courant. Or, un certain nombre de documents permettent d'établir sa responsabilité dans cette affaire).

Donc sert à introduire un élément qui a la valeur d'une conséquence. Il fonctionne exactement comme un adverbe du type par conséquent.

Car, qui n'est pratiquement employé qu'à l'écrit, indique que la seconde proposition est une explication de la première (On s'en aperçut, mais trop tard, car personne n'y avait songé à temps).

3

 

LES CONJONCTIONS DE SUBORDINATION

Les conjonctions de subordination (que, quand, lorsque, comme, si, puisque, etc.) et les locutions conjonctives, qui sont des conjonctions composées de plusieurs mots (alors que, parce que, depuis que, avant que, bien que, de telle sorte que, si bien que, à moins que, etc.), servent d'introducteurs aux diverses propositions circonstancielles (de temps, de cause, de but, de conséquence, de concession, d'opposition, de condition, de comparaison). Exemple : Je ne suis pas allée au cinéma depuis que je suis rentrée de vacances ; Il est rentré avant qu'il ne pleuve.

La conjonction que introduit les propositions subordonnées dites complétives (Je sais qu'il est tard).

La signification des conjonctions est liée à celle de la subordonnée qu'elles introduisent. Certaines sont polysémiques, comme alors que, qui sert à la fois à l'expression du temps et de l'opposition (Elle est sortie alors que je lui avais déconseillé ; Le chat est sorti alors que j'ouvrais la porte au plombier).

 
1.4-Les pronoms relatifs:

Les pronoms relatifs, qui, que, quoi, dont, où, lequel (laquelle, lesquels, lesquelles) sont les termes introducteurs des propositions subordonnées relatives.

Qui fonctionne comme sujet et comme complément prépositionnel (La personne qui vous demande est arrivée. La personne avec qui vous avez rendez-vous est arrivée).

Que est complément d'objet direct (Je ne connais pas la personne que vous avez convoquée).

Dont est analysable comme l'amalgame de la préposition de et d'un pronom relatif (La femme dont je vous ai parlé = de laquelle).

est un adverbe pronominal relatif, qui introduit des subordonnées à valeur locative (La ville où je suis né…). La forme quoi est précédée d'une préposition (C'est ce à quoi je pensais) ainsi que les formes du pronom lequel (C'est une idée à laquelle il faudra réfléchir).

Il existe enfin une série de pronoms relatifs qui amalgament lequel et les prépositions à et de. Auquel et auxquels sont analysables comme un amalgame de à et de lequel.

Duquel et desquels comme un amalgame de de et de lequel (Il y a un problème auquel nous n'avons pas pensé).

1.5-Les déterminants:
 
 

En français, le nom est identifié principalement par la présence d'un déterminant : "le commencement", "un garçon", "le boire et le manger", "son arrivée", "mon rouge préféré"... On notera toutefois que les noms propres sont "auto-déterminés" et ne prennent donc généralement pas de déterminant : "Monsieur Dupont", "Pierre"... Certaines structures sont également suffisamment actualisées dans le discours par des marques diverses pour pouvoir fonctionner sans déterminants : c'est le cas des pluriels pris dans une énumération en français contemporain "Feuilles, déchets, bouteilles en plastique, tout s'envolait dans la ville envahie par le vent". C'était le cas de plus nombreuses structures en français plus ancien dont les proverbes ou dictons ont conservé la trace : "Pierre qui roule n'amasse pas mousse" : notons qu'ici c'est la relative déterminative qui permet l'actualisation du nom en l'absence de tout article ; on ne pourrait dire "Pierre n'amasse pas mousse", sans penser immédiatement à un nom propre ! [note 7].

On distingue traditionnellement :

  les déterminants définis , les déterminants indéfinis , les déterminants possessifs , les déterminants démonstratifs , les déterminants numéraux

(ces "déterminants" appelés ainsi d'un terme qui indique la fonction, sont parfois appelés aussi "articles", terme qui dès lors ne fait plus allusion qu'à la petite taille de ces mots : article, qui vient du latin articulum veut dire "petite partie").

On fera attention à ne pas confondre les déterminants et les pronoms, petites parties du discours dont les fonctions sont complètement différentes : le déterminant fonctionne toujours avec un nom qu'il détermine, le pronom fonctionne à la place du déterminant et du nom qu'il remplace :

Ex. "mon livre" : "mon est un article possessif ; "le mien est plus beau que le tien" : "le mien" et "le tien" sont des pronoms possessifs remplaçant "mon livre" ou "ton livre".

"cette table est ronde, celle-ci est carrée" : "cette" est un déterminant démonstratif, "celle-ci" est un pronom démonstratif.

"le garçon mange une pomme" : "le" est un déterminant défini" ; "le garçon la mange" : "la" est un pronom.

Les déterminants définis :

L'article défini peut recevoir une interprétation générique :

"La femme est l'égal de l'homme"

ou une interprétation spécifique :

"La femme tenait un livre dans sa main" (la femme dont on parle et non pas la femme en général)

Cet usage spécifique peut être confirmé, renforcé par le recours à des compléments du nom qui précisent davantage la spécificité voire l'unicité du référent :

"La femme de Pierre tenait un livre dans sa main"

Le déterminant défini varie en genre et en nombre avec le Nom, coeur du GN (Groupe Nominal) qu'il détermine :     Le livre   - La table   - Les bouteilles

Dans un texte, la situation et le contexte jouent chacun à leur façon et, parfois, chacun à leur tour, un rôle dans l'identification du référent :

"Passe-moi le livre" (identification situationnelle)

"Arrivèrent un homme et une femme. La femme tenait un livre dans sa main" (identification contextuelle).

Les déterminants indéfinis

Cette catégorie de la grammaire traditionnelle est souvent très hétérogène. La principale distinction qu'il convient d'opérer parmi les déterminants indéfinis est toutefois celle qui permet d'opposer des quantificateurs (le plus nombreux) et des qualificateurs.

Le premier indéfini que l'on cite généralement est "un/une" (dont le pluriel se fait en "des"/"de" selon le contexte) :  Un garçon, une fille, des enfants, de gentils enfants..."

Les autres quantificateurs peuvent être classés ainsi, selon qu'ils n'admettent pas ou peuvent admettre d'être précédés d'un autre déterminant (le, un...) :

En 1 les définis qui commutent avec "le" ou "un". Ex. "aucun homme" et non pas *"un aucun homme".

En 2 les définis qui peuvent apparaître après "un" ou "le", mais également seuls. On peut avoir aussi bien "quelques hommes" que "les quelques hommes..." - avec bien sûr une valeur différente.

En fonction de leur singularité/pluralité variable on les classe généralement de la façon suivante (la liste des indéfinis ici ne prétend pas être exhaustive : ces exemples sont donnés à titre indicatif) :

 

Ensemble vide

Singularité

Pluralité

Totalité

Distributif

type 1

aucun
pas.un
nul

Quelque
n'importe quel

plusieurs
certain(e)(s)
maint(e)(s)

tout(e)

chaque

type 2

--

Certain

quelques
divers
différents

--

--

 Les indéfinis non quantificateurs (ou qualificateurs) sont essentiellement "même", "autre" et "tel" qui s'emploient ou bien avec "un" ou "le", ou bien seuls devant un nom :

"Telle personne"/"Une telle personne" ; "même nouvelle"/"la même nouvelle" ; "tel homme"/"un tel homme"

1.6-L'article:

                 a. L’article

L’article indéfini (" un ", " une " ou " des ") désigne :

 

     une chose ou une personne prise dans une catégorie ou une espèce. Ex : un chat (" un animal qui

     vient de la race des chats "). Il peut dans ce cas avoir une valeur descriptive (dans les récits,

     notamment) ou recevoir une caractérisation qui modifie la nature du référent (" c’est un garçon

     dont le nez s’allonge à chaque fois qu’il ment ")

     le nombre singulier. Ex : J’ai un chat et deux chiens.

     une vérité générale. Ex : un enfant a besoin d’affection (= " l’enfant a besoin d’affection " ou

     " n’importe quel enfant a besoin d’affection ")

     l’exceptionnel, associé à une caractérisation ( adjectif, complément du nom ou proposition relative).

     Ex : Un soleil rouge se levait sur l’horizon, il a montré un courage admirable.

     au pluriel, on utilise l’article " des ". Ex : J’ai des amis américains. Sauf lorsqu’on utilise un

     adjectif derrière le nom. Ex : J’ai de bons amis américains. 

L’article défini (" le ", " la " ou " les ") est utilisé :

     pour désigner une chose ou une personne unique que tout le monde connaît. Ex : Le soleil a

     rendez-vous avec la lune.

     avec un nom en contexte, caractérisé par un adjectif, une proposition relative, un complément de

     nom ou tout simplement la situation de communication. Ex : L’homme qui est devant moi est très

     gentil. / Quel appartement sale ! le plafond doit être repeint.

     pour exprimer une généralité, qu’elle soit abstraite ou qu’elle désigne une matière ; il désigne donc

     l’ensemble de la chose. Ex : Le lait est bon pour la santé.

     à la place de l’adjectif possessif pour indiquer les parties du corps ; il est systématique avec les

     verbes pronominaux. Ex : Elle a mal à la tête. Elle s’est lavé les cheveux.

                               a. L’article partitif

     L’article partitif (" de ") sert à désigner la partie de quelque chose ou la partie d’un ensemble.

     Ex : Je bois du lait. Je mange du pain (une part de lait, une part de pain)

     Il s’utilise aussi pour la quantité indéterminée, pour les choses qu’on ne peut pas compter. Ex : Il

     faut du talent pour être acteur. Il est alors souvent utilisé avec le verbe faire. Ex : Je fais du sport.

     On trouve l’article partitif avec des noms propres pour désigner une partie de l’œuvre d’un artiste.

     Ex : Jouer du Mozart.

     L’article partitif se contracte avec l’article défini " le " et " les " : Je veux de le pain*= je veux du pain

     Je veux de les pâtes*= je veux des pâtes. Mais : je veux de la salade, je veux de l’avocat.

     Lorsqu’on utilise la négation, on utilise " de " avec l’article partitif comme avec l’article indéfini.

     Ex : Je mange du fromage. / Je ne mange pas de fromage.

     Lorsque la quantité est déterminée, on la précise avant le nom et on utilise " de ". Ex : Je bois 50

     cl de lait avant de partir au travail. Je bois beaucoup de lait.

                                      c. Absence d’article

     Comme on l’a vu, après la négation suivie de l’article partitif ou de l’indéfini.

     Après la négation " sans " et " ne… aucun / aucune ". Ex : Il n’a aucune chance de réussir.

     Après la préposition " avec " suivie d’un nom abstrait. Ex : Agir avec violence.

     Quelquefois dans une énumération .Ex: Politiciens, religieux et démagogues sont de la même

     race.

     Dans une apostrophe. Ex : " Citoyens et citoyennes, dormez tranquilles : la police veille sur vos

     quartiers. "

     Dans certaines constructions verbales avec " de ". Ex : Les champs étaient couverts de rosée. /

     Les populations de l’Europe médiévale mouraient de faim (toutes les expressions qui expriment

     une émotion, une sensation ou un manque).

     Dans certaines constructions verbales avec des verbes courants comme " faire ", " rendre ",

     " avoir ", " être " etc. : avoir faim, rendre service, faire signe, être domestique etc. Cet emploi

     construit une référence virtuelle, c’est-à-dire qui n’a pas été rendue actuelle, qui désigne

     abstraitement l’idée que représente le nom. Ex : Jamais homme ne me fit plus de peine.

     C’est aussi pour cette raison que le complément du nom ne possède pas d’article dans ce type

     d’expression : un billet de train, un cours de français, une table de cuisine. Un collier de perles.

     Mais : le couteau du boucher, la porte de la voiture : dans ce cas, la situation de communication

     partagée (co-énonciation) oblige à l’emploi de l’article.

     Dans certaines expressions populaires. Ex : Ventre affamé n’a pas d’oreilles.

                                 d. Le pronom de reprise " en "

     Le pronom " en " remplace les noms précédés de la préposition " de ". Ex : Vous buvez du café ?

     Oui, j’en bois. Vous avez de l’argent ? Oui, j’en ai.

 

     Lorsque la quantité est précisée, elle se place en dernière position. Ex : Vous avez un stylo ? Oui,

     j’en ai un. Vous buvez 5O cl de lait avant de partir travailler ? Oui, j’en bois 5O cl.

1.7-La préposition:

Préposition, nom donné à une classe de mots invariables qui servent à relier des termes à l'intérieur de groupes syntaxiques. La classe des prépositions n'a pas d'unité morphologique. On distingue traditionnellement les prépositions simples des prépositions complexes ou locutions prépositionnelles.

 Parmi les prépositions simples, un premier ensemble est constitué par des formes issues du latin (à, de, pour, par, sous, sans, etc.). Une série de formes appartient également à la classe des adverbes (devant, derrière, dessous, dessus, etc.). Un autre ensemble de prépositions simples dérive de la classe des participes (excepté, vu, durant, etc.).

 Les locutions prépositionnelles sont des formes complexes qui jouent un rôle comparable à celui des prépositions. Ce sont des syntagmes qui comportent un nom désémantisé, c'est-à-dire un nom qui n'est pas employé dans son sens plein, et qui sont lexicalisés, c'est-à-dire qu'ils font partie de l'inventaire des mots de la langue (à cause de, en dépit de, au lieu de, par rapport à, etc.).

 Les prépositions sont des termes qui jouent un rôle relationnel, c'est-à-dire un rôle de pivot entre deux termes. A l'intérieur du groupe nominal, elles permettent de relier un nom à un autre nom et introduisent des compléments du nom (l'intérêt de cet ouvrage; son goût pour la marche) et des compléments de l'adjectif (Il est sûr de lui).  cet égard, elles entrent dans la formation des locutions composées qui font ou non partie du lexique de la langue. Des composés comme verre à pied, tasse à thé, corbeille à pain, pain de sucre, eau de rose, etc., font partie de la langue, cependant que sur le même modèle nom+préposition+nom, on peut former en discours un nombre indéfini de composés : un bol de lait, de chocolat, de café, un verre d'orangeade, de grenadine, de vin, etc.

 A l'intérieur du groupe verbal, les prépositions relient au verbe les divers types de compléments verbaux, qu'il s'agisse des compléments circonstanciels (Vers le soir, un orage éclata), des compléments d'objet indirects introduits par les prépositions à et de (Il aspire au repos; Il rêve de partir) ou du complément d'agent des verbes à la voix passive, introduit par la préposition par (L'entretien a été réalisé par un journaliste spécialisé).

 Les valeurs sémantiques des prépositions sont très nombreuses, et la plupart d'entre elles cumulent de nombreuses significations temporelles, spatiales, finales, instrumentales, causales, concessives, etc. Certaines prépositions et toutes les locutions prépositionnelles du type en dépit de, aux alentours de, etc., ont une signification stable et n'introduisent que des compléments circonstanciels ayant une signification identique à la leur. Par exemple, malgré et en dépit de n'introduisent que des compléments ayant un sens concessif. Dès a toujours un sens temporel et à cause de toujours un sens causal. Mais des prépositions comme à, de, pour, en cumulent un grand nombre de significations possibles. A, de, dans, pour, depuis, en, peuvent avoir une signification temporelle (à huit heures, de huit à neuf, dans huit jours, pour demain, depuis le matin, en deux minutes) mais aussi une signification spatiale (rester à la maison, revenir de Paris, être dans le jardin, partir pour l'Asie, observer quelque chose depuis la fenêtre, vivre en Asie).

 
 
 
 
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